lundi 10 novembre 2008

les Guarani et la canne à sucre

ICRA News

Dans le Mato Grosso, la culture intensive de la canne à sucre prive les indigènes Guarani de leur terre et les contraints à travailler dans des conditions extrêmes. Aujourd’hui, les emplois sous-qualifiés de coupeurs de canne sont menacés par la mécanisation programmée du secteur sucre-éthanol dominé au MG par le groupe français Louis Dreyfus, par le biais de sa filiale LDC Bioenergia.
ICRA et d’autres associations ont écrit à Louis Dreyfus pour lui demander de prendre en compte la situation tragique des Guarani.

Cette campagne, à l’initiative de l’ONG Sucre éthique, vise à dénoncer la situation alarmante des indiens Guaranis, premier peuple indigène du Brésil, dans l'Etat du Mato Grosso do Sul (MS), qui travaillent pour l’industrie agroalimentaire dans des conditions très dures, parfois même à l'état de semi-esclave, et dont les emplois sont désormais menacés par la mécanisation programmée du secteur sucre-éthanol.

La population Guaranis dans le Mato Grosso do Sul représenterait environ 42000 individus dont 83% des hommes en âge de travailler seraient coupeurs de canne à sucre, soit environ 13000 travailleurs. Le groupe français Louis Dreyfus, par le biais de sa filiale LDC Bioenergia, est le premier employeur du secteur dans le MS et donc des Guarani.

L’inauguration d’une nouvelle usine de sucre et d'éthanol dans le MS, pour un investissement de 430 millions de dollars, porte à huit le nombre d’usines détenues par le groupe au Brésil, toutes "situées de façon stratégique" dans le pays. Le Brésil, second producteur mondial d'éthanol derrière les Etats-Unis, a produit 18 milliards de litres en 2007 et en a exporté trois milliards de litres. Louis Dreyfus Commidities Bioenergia, l'un des principaux traiteurs de canne à sucre du monde, exporte son éthanol aux Etats-Unis, en Europe, en Corée et au Japon.

C’est la survie de la communauté toute entière qui est en jeu, car la mécanisation détruira la principale source de revenu des Guaranis.

A partir d’une demande rédigée par le Cimi (Conseil Missionnaire Indigène) et relayée par Sucre Ethique en France, un appel de la société civile est lancé à l’entreprise Dreyfus concernant le premier peuple indigène du Brésil.

L’objectif de cette campagne et de permettre de sensibiliser l'entreprise en France, propriétaire pour le grand public métropolitain du club de football l’Olympique Marseillais et de la compagnie de téléphonie 9 télécom.

En mettant l’entreprise Dreyfus face à ses responsabilités en tant qu’employeur, cette campagne réclame :
- une juste indemnisation des travailleurs,
- le soutien à des programmes de restauration environnementale sur les terres indigènes avec les partenaires sociaux locaux,
- la constitution d’un fond qui sera reversé à des activités de récupération de l’économie de production d’aliments sur les terres indigènes,
- le soutien à une agriculture familiale,
- et surtout l’accompagnement des politiques de mécanisation par des politiques sociales d’accès à l’emploi, directement liées au secteur ou indirectement, par une diversification de l’économie locale.

ICRA et les associations (Sucre-ethique, Peuples Solidaires, CIMI, CSIA, Fian France, France Liberté, etc.) qui prennent part à cette campagne ont envoyé courant septembre un courrier à l’entreprise Dreyfus pour lui demander de respecter les droits sociaux, territoriaux et environnementaux des Guarani.

Brésil : un éthanol pas très éthique

Face aux changements climatiques et à la flambée des prix du pétrole, les agro carburants sont présentés comme une alternative énergétique durable. Parmi eux, l’éthanol, cet alcool qui peut notamment être obtenu grâce au traitement de la canne à sucre et dont le Brésil, avec une production de 18 milliards de litres pour 2007, est le deuxième plus gros producteur du monde, derrière les Etats-Unis. Une donnée qui n’aura pas échappé à Gérard Louis Dreyfus, l’un des hommes d’affaires français les plus riches du monde et le n°2 du secteur sucre-éthanol au Brésil. Déjà bien implanté dans ce pays, via sa filiale Louis Dreyfus Commodities Bioenergia, celui-ci prévoit d’étendre rapidement la culture de la canne à sucre, en construisant des distilleries à travers tout le pays, et en mécanisant la production. Cette modernisation permettra sans aucun doute de produire plus, plus vite et à moindre coût, mais elle met également en péril des milliers d’emplois, occupés en majorité p ar une main-d’oeuvre indigène qui a pendant des décennies été exploitée par cette industrie sucrière…

Dans l’Etat du Mato Grosso do Sul, situé dans le Sud-Ouest du pays, environ 13 000 indigènes, pour la plupart des indiens Guarani, travaillent dans les plantations de canne à sucre et dans les usines de transformation d’éthanol. Depuis des dizaines d’années, ils constituent la main-d’œuvre principale de cette industrie et en paient le prix. Mauvaise alimentation, sanitaires bouchés et sans eau, logements précaires, dortoirs surpeuplés et envahis par la moisissure, accidents du travail, salaires impayés etc: telles sont les conditions d’exploitation des travailleurs des plantations, révélées par les inspecteurs de l’Etat en novembre dernier. Des conditions apparentées, par les autorités elles-mêmes, à de l’esclavage.

Promotion de l’éthanol et protection insuffisante des travailleurs indigènes

Dans les années 1980, un programme national de promotion de l’éthanol (dit “Programme Proálcool”) a été adopté pour inciter à la production de canne à sucre dans l’État du Mato Grosso do Sul. Les hommes Guarani ont alors quitté leurs villages, en direction des exploitations de canne, distantes de plusieurs centaines de kilomètres. S’entassant dans des baraquements de toile, et buvant l’eau de la rivière avec les animaux, l’emploi et les conditions de travail de ces hommes étaient informels et anarchiques. Il n’existait pas de contrat de travail et les salaires étaient régulièrement détournés voire pas versés du tout.

Dans les années 1990, grâce aux pressions exercées par certaines organisations de la société civile, on assista à quelques améliorations. En 1999, fut signé dans le Mato Grosso, le Pacte du travailleur indigène. Celui-ci imposa le contrat de travail pour les ouvriers de la canne, d’une durée maximum de 70 jours, pour permettre le retour des indiens dans leurs villages, et ainsi favoriser la continuité de la vie communautaire et le respect des normes de confort, d’hygiène et de sécurité s’appliquant à tous les travailleurs ruraux.

Mais l’application de ce Pacte a été et reste aujourd’hui encore insuffisante. Au cours des dernières années, des inspections du ministère du Travail et de l’Emploi ont mis en lumière des violations persistantes des droits des travailleurs chez les ouvriers du secteur sucrier et de l’éthanol, notamment des irrégularités concernant la signature des contrats de travail et les conditions de sécurité et de logement.
Bien que mal appliquée, cette réglementation du Travail a conduit les grands propriétaires d’exploitations de canne à sucre, toujours incités par le gouvernement à investir dans l’éthanol, à intensifier la mécanisation des récoltes.

La mécanisation menace les travailleurs

Les Guarani occupaient originellement 8 Mha de forêts dans le Mato Grosso do Sul actuel. Expulsés par les planteurs de soja et les éleveurs de bétail, les 42 000 Guarani restants vivent aujourd’hui dans des campements surpeuplés, dans lesquels sévissent la malnutrition, la misère, l’alcoolisme et la violence. On leur a volé leurs terres, on a détruit leurs ressources naturelles et on les a confinés dans des camps pour les intégrer de force au monde du sous-emploi explique André Campos, du Conseil indigène missionnaire (CIMI), une organisation qui œuvre pour la défense des droits des peuples indigènes au Brésil. Le travail hors du village a généré insécurité et violence et l’économie indigène s’en est retrouvée totalement déstructurée, la production d’aliments étant gravement affectée, et la population étant tombée dans une totale dépendance vis-à-vis de l’assistance publique du gouvernement.

C’est dans ce contexte économique et social, que la société Louis Dreyfus Commodities Bioenegia a décidé d’acheter des usines et d’installer un nouveau complexe sucre-éthanol qui devrait entrer en activité dans les prochains mois dans le Mato Grosso do Sul. D’après la multinationale, toutes les activités de récolte de la canne y seront entièrement mécanisées. Une politique qui devrait en outre être suivie dans les autres usines de l’entreprise, six en tout dans cet Etat. Au total, ce sont 10 000 à 12 000 emplois qui seront supprimés par la mécanisation dans cet Etat, dans lequel Dreyfus est le premier employeur. Qu’est-ce qui arrivera alors? Quelles seront les conséquences pour les milliers de familles qui se retrouveront sans travail ?

Pour le CIMI, en tant que premier employeur du Mato Grosso do Sul, et deuxième plus gros producteur d’éthanol du pays, la société Louis Dreyfus ne peut ignorer les conséquences économiques et sociales qu’aura la mécanisation sur les populations Guarani de l’Etat. Celle-ci a fait et va continuer à faire d’énormes bénéfices en investissant dans une industrie qui depuis des années s’est développée au prix d’énormes préjudices pour les populations indigènes locales. Aujourd’hui, si l’on peut espérer que la mécanisation mettra un terme aux abus dont les Guarani sont victimes dans leur travail, et notamment au travail esclave dans les plantations, tout porte à croire qu’ils seront à nouveau les laissés pour compte de l’expansion de l’éthanol.
Peuples Solidaires

Pour plus d'informations
Le site de l’ONG Sucre éthique
Peuples Solidaires
Le blog de Fian consacré au peuple Guarani
Prix Pinocchio : Voter pour Dreyfus, nominable pour le prix des droits humains


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vendredi 7 novembre 2008

entretien avec Xavier Gegout, volontaire

Interview menée par Jose Maria Tavares de Andrade qui a mis en relation Xavier Gegout, étudiant, avec les Potiguara dans le cadre du projet mené par l'association Aruana.

1. ARUANA: No ano passado, você viveu entre os Potiguara da Baia da Traiçao, um

primeiro estágio de Extensão Universitária,  como nasceu este novo projeto?


 Il s'agissait d'un stage réalisé dans le cadre d'une formation en Sciences

Humaines (Master des métiers de l'expertise anthropologique et culturelle) de

l'Université Marc Bloch de Strasbourg.

L'objectif de ce stage était la valorisation des connaissances des plantes

médicinales, ainsi que la transmission entre générations, dans un village

(Aldeia Forte) de la communauté Potiguara de la Paraiba.

Ce projet s'est articulé autour d'activités d'animations avec les enfants du

village, encadrés par une petite association locale, qui s'occupe également de

fortifier la pratique d'une danse traditionnnele, le Toré.

Avec les enfants, nous avons créé un jardin de plantes médicinales riche d'une

quarantaine d'espèces, avec le concours des personnes âgées détentrices de

savoirs en phytothérapie.

Ces informations ont été compilées, dans l'objectif d'éditer un livret.


2. ARUANA:Nos próximos dias você continua a experiência ...


 Grâce à une bourse du REFEB (réseau français d'études brésiliennes) de

l'ambassade de France au Brésil, je vais retourner sur place afin de participer

de nouveau à la dynamique de ce projet. Il serait intéressant de partager l'idée

d'un jardin collectif avec d'autres villages. Un autre volet de ce nouveau

séjour concerne la valorisation de petits espaces de cultures alimentaires, qui

s'inscrit dans l'intention de développer une autonomie locale, favorable à la

santé et à la protection de l'eau et des espaces naturels.


3. ARUANA:Entre este dois estagios ARUANA colaborou com uma pequena ajuda

financeira, que obtivimos...


 Cette somme va permettre l'édition et la diffusion dans la communauté du livret

"Plantar para Curar" (Planter pour Soigner), qui a été adapté et approuvé par les

personnes impliquées dans le projet. Ce petit guide illustré porte l'intention

de conserver une petite partie des connaissances phytotérapeutiques locales,

mais surtout de stimuler l'intérêt et la communication autour des pratiques

traditionnelles et alternatives de santé par les plantes. Ce support sera reçu

par chaque famille d'Aldeia Forte, et par chaque école et poste de santé des

villages de la communauté Potiguara de Baia da Traiçao.