mardi 20 novembre 2012

Un peu d'espoir pour les Guarani-Kaiowà


ICRA News

Le tribunal régional fédéral de la troisième région, à São Paulo, a suspendu l’opération d’expulsion du campement où trouvent des Indiens Guarani-Kaiowá, répondant ainsi à la demande de la Fondation Nationale de l'Indien (FUNAI).

Les 50 hommes, 50 femmes et 70 enfants de cette communauté Guarani-Kaiowá pourront rester au coeur de la ferme Cambará, à Iguatemi, dans l’état du Mato Grosso do Sul, où ils sont confinés sur un terrain de 2 hectares. La décision demeurera donc en vigueur jusqu'à la fin de l'identification et de la démarcation de ces territoires indigènes par la FUNAI .

La solution est précaire, puisque les relations avec le propriétaire des terres demeurent tendues et dangereuses. Mercredi 24 octobre, on apprenait qu’une femme, originaire de Pyelito Kue, avait été sexuellement agressée par huit hommes.

Le Ministère de la Justice a envoyé de nouveaux renforts de la Force nationale pour maintenir l'ordre dans la région.

Les dirigeants Guarani-Kaiowá se sont réjouis de la décision judiciaire, mais ils ont estimé que seule la démarcation des terres mettra fin au conflit entre les Indiens et les producteurs agricoles de la région. Ils cherchent à augmenter le réseau de solidarité pour le peuple Guarani-Kaiowá. La lutte n'est pas seulement contre les expulsions, mais aussi pour la démarcation définitive des terres indigènes.

Il faut savoir que dans l'Etat de Mato Grosso do Sul, 43 000 Indiens Guarani-Kaiowa revendiquent un retour sur leurs terres d’origine qu’ils appellent “ tekoha ”, littéralement “ le lieu où il est possible de vivre à notre manière ”. Ils souhaitent quitter les réserves et installent des campements, qui, la plupart du temps sont légaux .

Il existe aujourd’hui plus de 30 campements Guarani-Kaiowá confinés sur les bords des routes ou à l’intérieur des “ fazendas ”, dans des zones qu’ils ont occupées. À cela s’ajoutent plus de 20 zones récupérées et régularisées sous la forte pression des indigènes qui ont perdu plusieurs leaders communautaires dans leur lutte. Mais tous ces territoires sont très restreints.

Une note technique de la FUNAI, publiée en mars 2012, déclare que le territoire revendiqué par les Indiens à Pyelito Kue et Mbarakay est occupé depuis les temps ancestraux par les Guarani-Kaiowa. Depuis 1915, quand a été établie la première Terre Indigène, et surtout depuis les années 70 et 80, les expulsions des Indiens se sont multipliées au profit des propriétaires fonciers agricoles (principalement pour doper les productions de canne à sucre ou de soja), en plus du confinement et du regroupement des différents groupes ethniques, ce qui entraîne l’insécurité et le déracinement culturel et social.

La situation du groupe Guarani-Kaiowá, la deuxième population autochtone du Brésil, est considérée comme la plus grave. Confinés dans des réserves indigènes comme celle de la ville de Dourados, ils se trouvent dans une situation de catastrophe humanitaire : au-delà de la malnutrition des enfants et de l'alcoolisme, les taux d'homicides sont plus élevés que dans les zones de guerre comme l'Irak.

Le député d’État du Mato Grosso do Sul, Peter Kemp, leader du parti politique des Travailleurs (PT), a déclaré à l'Assemblée législative du Mato Grosso do Sul, le 31 octobre : “ le développement n'est pas seulement l’élevage de bœufs et la production de maïs et de soja, mais aussi le respect des personnes, le droit à la citoyenneté. Le développement doit être économique et social, et doit être le droit de tous ”.

 Nous, Guarani-Kaiowá, survivants et qui voulons vraiment survivre, souhaitons par ce simple message exprimer notre immense remerciement public à toutes et tous d'avoir ajouté Guarani-Kaiowá à vos noms. Comme chacun sait, les Guarani et les Kaiowá, seuls, peuvent être exterminés, mais nous avons la certitude qu'avec la solidarité humaine réelle et le soutien de vous tous nous pouvons être sauvés des diverses violences annoncées envers nos vies et surtout éviter notre extinction ethnique.
Grâce à ce geste d'amour pour nos vies que vous manifestez, nous ressentons un peu de paix et d'espoir en une vraie justice. Nous avons compris qu'il existe des citoyennes et des citoyens mus par un réel amour du prochain, qui ont soif de justice et qui exigent cette justice. Nous ne savons pas avec quels mots vous remercier tous sinon en disant JAVY'A PORÃ, que la paix soit dans vos cœurs.
. ”


Emmanuelle Leroy Cerqueira, traduction d’Ines Pereira
Global Voices et Libresamériques

Pour plus d'informations

vendredi 9 novembre 2012

Soirée spéciale le 7 décembre - marché de Noël le 8 décembre


INVITATION

L'association ARUANA a le plaisir de vous annoncer les deux rendez-vous suivants et de vous inviter très cordialement à vous joindre à ses membres

L'association ARUANA (de soutien à l'environnement et à la culture des peuples indigènes du Brésil) organise un dîner et une soirée le 7 décembre. Elle aura lieu au restaurant Patio portugais, 22a rue Ste Hélène à Schiltigheim à partir de 19 h 30. Accès en bus N°6 arrêt Embranchement ou Moser. La rue est perpendiculaire à la route du général de Gaulle sur le côté droit en venant de la place de Haguenau.

Après le dîner, l'association présentera un film sur un peuple indigène, commenté en direct par son réalisateur-conférencier Francis Salvador. Ensuite les participants pourront échanger avec les membres de l'association sur les projets réalisés et en cours. et la situation des Amérindiens.

Pour le dîner veuillez vous annoncer au restaurant Patio portugais
page1image10216
Tél N° 03 88 48 42 83 pour des raisons d'organisation


Le samedi 8 décembre, l'association aura un stand au marché de Noël associatif qui se tiendra de 10 à 20 h salle Kléber à l'église Notre-Dame, située route du général de Gaulle (juste avant le centre Leclerc), à Schiltigheim, arrêt du bus N° 6 Trois Epis. Nous y vendrons de l'artisanat
indigène brésilien.

VENEZ NOMBREUX POUR UNE RENCONTRE 
SOLIDAIRE ET CONVIVIALE

pour tout renseignement :
tél : 03 88 62 13 72
page2image8752
page2image9024
page2image9296

Menaces supplémentaires pour les Guarani-Kaiowà


Génocide indigène en vue au Brésil : la Justice Fédérale ordonne l’expulsion des indiens Guarani-Kaiowá

Génocide indigène en vue au Brésil : la Justice Fédérale ordonne l’expulsion des indiens Guarani-Kaiowá
© F. Watson/Survival
En réaction à cette décision infamante, nous vous proposons le texte d'une lettre ouverte de la communauté Guarani-Kaiowá. Dans cette déclaration poignante, leur communauté exprime sa détermination à vivre et mourir sur leurs terres.
Nous, 50 femmes, 50 hommes et 70 enfants, des communautés Guarani-Kaiowá originaires de tekoha Pyelito kue/Mbrakay, présentons par cette lettre notre situation historique et notre décision face à l’ordre d’expulsion exprimé par la Justice Fédérale de Navirai (Mato Grosso do Sul), dans le procès nº 0000032-87.2012.4.03.6006 du 29 septembre 2012.

Nous avons été informés que nos communautés seront attaquées, violentées et explusées de la berge de notre rivière par la Justice Fédérale de Navirai elle même. Il est ainsi évident pour nous que l’action de la Justice Fédérale provoque et augmente les violences contre nos vies, en ignorant notre droit de survivre sur les berges de cette rivière, proche de notre territoire traditionel Pyelito Kue/Mbarakay.

Nous comprenons clairement que cette décision de la Justice Fédérale de Navirai fait partie du processus d’extermination et de génocide historique dont souffre le peuple indigène, natif, autochtone du Mato Grosso do Sul. Cela signifie que l’action de la Justice Fédérale nous porte atteinte en soutenant notre extermination. Nous voulons laisser clair au gouvernement et à la Justice Fédérale que nous avons perdu l’espoir de survivre dignement et sans violence sur notre territoire ancestral, nous ne croyons plus en la Justice Brésilienne.
À qui pouvons-nous dénoncer les violences pratiquées contre nous ? À quelle Justice du Brésil ?? Si la Justice Fédérale elle même génère et alimente les violences contre nous. Nous avons évalué notre situation actuelle et avons conclu que nous allons tous mourir d’ici peu, nous n’avons aucune perspective de vie digne et juste, ici sur les berges de la rivière ou ailleurs. Nous avons notre campement à 50 mètres de la rivière Hovy où 4 personnes sont mortes, 2 de suicide, 2 des suites de la violence et des tortures des « pistoleiros » des « fazendas ». Nous vivons sur les berge de cette rivière Hovy depuis plus d’un an, nous n’avons aucune assistance, nous sommes isolés, encerclés par les « pistoleiros » mais nous résistons jusqu’à aujourd’hui. Nous nous alimentons une fois par jour. Nous passons notre temps à vouloir récupérer notre territoire ancestral Pyleito Kue/Mbarakay.

En fait, nous savons très bien qu’au centre de notre territoire ancestral sont enterrés beaucoup de nos grands parents, là se trouve le cimetière de nos ancêtres. Conscients de ce fait historique, nous voulons mourir et être enterrés auprès de nos ancêtres, ici même. Nous demandons donc au gouvernement et à la Justice Fédérale de ne pas emettre cet ordre d’expulsion. Nous sollicitons que soit décrété notre mort collective et que nous soyons tous enterrés ici. Nous demandons que soit décrétée une fois pour toute notre décimation / extinction totale et que soient utilisés des tracteurs pour ouvrir notre fosse commune. Ceci est notre demande faite aux juges fédéraux.

Nous attendons donc cette décision de la Justice Fédérale : décréter la mort collective des Guaranis-Kaiowá de Pyelito Kue/Mbarakay et nous enterrer ici. Nous avons décidé de ne pas partir d’ici vivants ou morts car nous considérons que nous n’avons plus aucune chance de survivre dignement sur notre territoire ancestral, où nous sommes massacrés et mourrons rapidement. Nous savons que nous serons expulsés d’ici, de la berge de la rivière, mais nous n’allons pas quitter la rivière. En tant que peuple natif, indigène et historique, nous avons choisi tout simplement d’être mis à mort collectivement ici. Nous n’avons pas d’autre alternative, ceci est notre dernière décision unanime pour répondre à l’ordre d’expulsion de la Justice Fédérale de Navirai.


Date de l'article : 14/10/2012

Pétition urgente contre le barrage Belo Monte

Bonjour à tous,

le projet de barrage Belo Monte en pleines terres indigènes du Xingu a été stoppé par la justice pour insuffisance de respect de la législation. Mais les pressions sont très fortes pour le faire repartir. Il est encore possible de faire pression dans l'autre sens, pour qu'il soit abandonné définitivement et que les droits des peuples autochtones soient respectés.

Veuillez signer la pétition du cacique RAONI et des populations indigènes de la région concernée du Xingu sur le site internet suivant :

http://www.raoni.com/signature-petition-contre-belo-monte.php

Plus il y aura de signatures, plus grandes seront les chances d'aboutir !

Merci d'avance à tous ceux qui signeront

Droits des peuples autochtones et grands barrages


Texte présenté au Conseil des Droits de l'Homme en septembre 2012 à Genève par un collectif d'associations

Rappel du précédent état des lieux du respect des droits des peuples autochtones au Brésil
Lors de la dix-neuvième session du Conseil des Droits de l’Homme, nous avons alerté le Conseil sur le fait que l’Etat brésilien ne respectait pas les droits des peuples autochtones tels que garantis par la Convention n°169 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, en particulier dans la mise en oeuvre de sa stratégie énergétique en Amazonie. En effet, la construction de nombreux barrages hydroélectriques, dont l’emblématique Belo Monte, ainsi que l’assouplissement de son code forestier menacent les modes de vie de nombreuses populations autochtones qui dénoncent l’absence de consultation.
Le Brésil s’est vu rappelé ses obligations à maintes reprises: par l'Institut Brésilien de l'Environnement, puis par le Ministère Public Fédéral, par la Cour Suprême du Brésil, par James Anaya, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des populations autochtones, par la Commission interaméricaine des Droits de l’Homme,1 et enfin par la Justice fédérale de la région du Pará.
En réponses à ces actions, «la présidente du Brésil, Mme Dilma Rousseff, décida de suspendre les relations de son gouvernement avec la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) de l’Organisation des États américains (OÉA)»2 en rappelant son ambassadeur et ne participa pas à l’audience fixée par l’OEA à Washington le 27 octobre 2011. Sous la pression du Secrétaire Général de l'OEA, la Commission a modifié les mesures conservatoires dans cette affaire et n'a plus exigé du Brésil que le projet soit suspendu.3
Puis le Procureur Général de l'Union au Brésil déposa une procédure administrative contre les procureurs fédéraux et obtint le 9 novembre 2011 une révision du premier jugement fédéral du 27 septembre 2011 qui avait ordonné la suspension des travaux.
Aggravation en 2012 du non-respect des droits territoriaux des populations autochtones du Brésil
Deux évènements en 2012 ont laissé entrevoir l'espoir que le Brésil se soumettent à ses obligations constitutionnelles et internationales.
En mars 2012, l’OIT a prié le Brésil de «prendre les mesures nécessaires pour consulter les peuples autochtones concernés sur la construction de l'usine hydroélectrique de Belo Monte, celle-ci risquant d'avoir des effets irréversibles (articles 6 et 15 de la Convention)» puis «de transmettre les informations sur les résultats des procédures en cours devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme et devant le tribunal fédéral du Pará».
Parallèlement, au Brésil, le Tribunal régional fédéral de la première région (TRF1) a annoncé le 14 août 20124 avoir «ordonné l'arrêt des travaux parce que les indigènes n'avaient pas été consultés avant le début de la construction» lors d'un jugement tenu la veille sur la requête du Ministère Public Fédéral du Pará. «En 2005, quand le parlement brésilien5a approuvé ce chantier, il a exigé une étude d'impact environnemental postérieure au lancement des travaux et non préalable comme l'ordonne la loi», a souligné le tribunal.
Mais les actes posés par le gouvernement brésilien ces derniers mois semblent démontrer une volonté de s'affranchir de toutes les contraintes liées aux droits territoriaux indigènes inscrits dans la Constitution de 1988, et il est attendu que le consortium public Norte Energia, en charge des travaux, fasse appel du dernier jugement fédéral.
En mai 2012, le gouvernement brésilien a donné son accord, après y avoir apposé 12 vetos et 31 amendements, à la loi visant à réformer le Code forestier de 1965. Cette loi a été approuvée par le Congrès en avril 2012 et doit encore être approuvée par le Sénat.
Si l'exigence de préserver intacts jusqu'à 80% des forêts dans les grandes propriétés en Amazonie et 20% en forêt tropicale a été conservée par le gouvernement, celui-ci a en revanche accepté plus de flexibilité pour les petits propriétaires, sans mettre de garde-fous pour surveiller toute déforestation. Or, cette mesure est ambiguë et dangereuse car des grandes entreprises agricoles peuvent acheter des terres, les revendre pièce par pièce aux petits propriétaires qui représentent le quart des exploitations agricoles. Ainsi le déboisement peut se faire au détriment de la Loi.
Ce déboisement affecte de plusieurs façons les populations autochtones. Couper la forêt au profit de cultures agricoles intensives détruit les lieux de vie et les ressources vivrières de ces peuples. Ils sont expulsés de leurs terres avec violence. L’exemple des Guarani de Laranjeira Nanderu ou d’Apyka’y est emblématique puisque qu’aujourd’hui nombre d’entre eux vivent dans des campements improvisés au bord des routes, après avoir vu leurs maisons incendiées et des hommes de mains armés tirer sur les membres de leur communauté pour pouvoir récupérer leurs terres.
Cette situation devient d’autant plus préoccupante qu’une ordonnance publiée le 17 juillet 2012 revient sur les droits territoriaux des populations autochtones du Brésil et met un coup d’arrêt à la démarcation des terres indigènes entamée en 1989 et pourtant loin d’être terminée. Cette démarcation, inscrite dans la Constitution de 1988, permet de reconnaître des droits inaliénables aux terres indigènes.
Une fois acquise, la démarcation accorde aux communautés autochtones l'usufruit exclusif des richesses du sol, des rivières et des lacs. Il est aussi expressément reconnu que les terres des peuples autochtones sont inaliénables, qu'on ne peut en disposer et qu'elles ne peuvent être assujetties au droit de prescription. Le territoire est déclaré propriété de l'Union. Et le gouvernement fédéral a la responsabilité de délimiter, protéger et respecter toutes leurs propriétés (art. 231). Cet article fait preuve d’une prise en considération des principes énoncés par la Convention 169 de l’OIT.
L’ordonnance 303 publiée au Journal Officiel le 17 juillet 2012 prévoit à l’inverse que «l’usufruit des richesses du sol, des rivières et des lacs existants sur les terres indigènes peut être relativisé chaque fois qu’il existe un intérêt relevant de l’intérêt public de l’Union».
Cette ordonnance est l’aboutissement d’un lobby de l’agrobusiness appuyé par des parlementaires et des sénateurs qui demandaient la mise en votation de la proposition d'amendement constitutionnel6 prévoyant un transfert de compétence du Gouvernement au Congrès national.
L’ordonnance 303 répond ainsi aux souhaits chers à la Confédération Nationale de l’Agriculture et à la Fédération de l’Agriculture et de l’Élevage du Mato Grosso do Sul. Mais aussi, elle répond à l’attente de l’administration brésilienne qui cherche à extraire de nombreux minerais présents en Amazonie. Les barrages construits sur les rivières d'Amazonie fourniront l'électricité nécessaire à l’exploitation de ces mines. 21 barrages sont planifiés d’ici 2020. Et la transformation des rivières en voies d'eau d'expédition réduira les coûts de transport vers des ports d'escale. Seulement ces gisements et ces rivières se trouvent en grande partie sur des territoires indigènes.
En conséquence, le procureur de l’Etat du Mato Grosso do Sul a déclaré que les études de démarcation de terres indigènes devaient être refaites, avec la participation du gouvernement local, qu’il «est nécessaire d’annuler ce qui a déjà été fait et recommencer au début, en modifiant les groupes techniques.»7
Si l’on met en perspective le travail incessant de revendication et les campagnes internationales menées depuis plus de 20 ans par les leaders autochtones comme le cacique Raoni Metuktire-Kayapo ou les porte-parole Guarani-Kaiowá, pour obtenir la démarcation et l’homologation de leurs terres ancestrales, nous pouvons imaginer le désarroi que cette ordonnance va susciter au sein des populations. La démarcation du territoire des Kayapo entamée en 1994 est encore incomplète: la zone de Kapot Nhinore, identifiée en 2010 seulement, étant toujours en suspens concernant son homologation. A l’aulne de cette nouvelle ordonnance, le peuple Kayapo découvre aujourd’hui que tout est à refaire. Et cette situation n’est qu’un exemple parmi les revendications territoriales des populations autochtones du Brésil.
Ainsi les populations autochtones d’Amazonie brésilienne voient leur droit à la terre et leur droit de réserve sur son usage, par une consultation libre et informée, particulièrement bafoués par l’Etat brésilien.
Recommandations
Les peuples autochtones du Brésil, dont les droits sont menacés par les activités économiques (industrie minière, hydroélectrique, pétrolière) et par la nouvelle législation brésilienne, relayés par nos organisations, demandent:
• que l’Etat brésilien respecte les recommandations de l’OIT concernant le droit à un consentement libre, préalable et éclairé des populations autochtones affectées par des projets industriels ou agricoles, puis transmette les informations sur les résultats des procédures en cours devant la CIDH et devant le tribunal fédéral de Pará;
• que l’Etat brésilien renonce à adopter un nouveau Code forestier qui ouvre la porte à une appropriation illégitime des terres indigènes et menace l’écosystème amazonien;
• que l’Etat brésilien abroge l’ordonnance 303 qui va à l’encontre des droits territoriaux inaliénables des populations autochtones acquis par la Constitution de 1988;
• que l’Etat brésilien reprenne et termine la démarcation des territoires indigènes débutée en 1989.



1 Mesure préventive de la CIDH: MC 382/10.
2 «Le Brésil suspend ses relations avec la Commission interaméricaine des droits de l’Homme», Centre d’Etudes interaméricaines (05 mai 2011).
3 Amnesty International-Rapport 2012.
4 Dépêche AFP, 14 août 2012 à 23:59.
5 Décret législatif 788/2005.
6 (PEC 215/2000).
7 «Quase três décadas após queda do regime militar povos indígenas ganham o seu AI-5, denuncia indigenista», Segunda, 23 de julho de 2012, Instituto Humanitas Unisinos.
Date de l'article : 12/09/2012

Texte publié par le site Urgence Amazonie  http://www.raoni.com/actualites-429.php

dimanche 4 novembre 2012

Parures et objets de perles chez les Kali'na de Guyane Française : entre tradition et modernité.

 « Au moment des grandes découvertes, les navigateurs constatèrent que, partout où ils abordèrent, même dans les endroits les plus isolées, les indigènes portaient des parures. Comme si, partout, les hommes avaient senti le besoin de s'individualiser, de se hausser, par delà leur condition première. » Musée d'ethnographie de Genève.

La tradition en ethnologie, mais également dans le sens commun est une pratique qui dure dans le temps, qui se transmet de génération en génération. Mais une question se pose : comment l'ethnologue définit-il ce qui relève de la tradition et ce qui relève de la modernité ? En l'occurrence ici les objets et les parures de perles. A partir de quel moment parle-t-on d'un objet traditionnel ? Est-il traditionnel s'il est apparu avant la colonisation et son influence ou peut-on aussi parler d'objets traditionnels s'ils sont apparus avec la colonisation ? C'est la question que l'on peut se poser avec les parures de perles kali'na et les poupées de perles que nous avons étudié.

En effet, lorsque l'on s'intéresse aux parures de perles, c'est-à-dire aux colliers, aux bracelets et aux boucles d'oreilles,  on s'aperçoit que les femmes fabriquent les parures pour deux occasions. La première occasion est le quotidien, puisque les kali'na portent des bijoux, des parures comme vous et moi en portons tous les jours pour accompagner un vêtement, pour habiller et parer notre corps. C'est un bijou, une parure que l'on pourrait qualifier d'esthétique, uniquement portée dans le but d'habiller et de parer le corps. Cette parure, n'a le plus souvent aucune signification ou du moins aucune signification sociale, pour la communauté. Elle peut en avoir pour la personne elle-même, notamment au niveau des couleurs qui composent la parure. Ce bijou est donc fait selon les goûts de la personne et non selon des règles ou des codes propres à la communauté à laquelle le porteur appartient.


Photo d'une parure dont la portée est esthétique (Prise par Léopold Julie, 2012)


La deuxième occasion est celle des cérémonies, rituels, fêtes et manifestations dans lesquels la parure prend un tout autre sens. Nous avons pu constaté que la parure est fonction de différents critères. Tout d'abord, le type de parure qui sera porté sera fonction du rang social de la personne. En effet, s'il fait partie d'une famille dirigeante sa parure le marquera, ainsi que s'il est chamane par exemple, ou il peut également, pour une femme, signifier qu'elle est mariée puisqu'une femme peut prendre les couleurs de son mari. En effet, lors d'une cérémonie de la communauté, une famille portera la couleur qui la représente, ce qui la différenciera des autres familles. La famille du chef coutumier se distinguera des autres familles par la taille de ses parures, plus imposante. De plus, comme nous venons de le dire, les couleurs ont une très grande importance dans la parure de cérémonie. Les couleurs ont chacune une signification bien particulière et sont choisies par les personnes pour une inclinaison particulière à leur signification. Mais il faut toutefois dire que si la personne lors d'une cérémonie peut apparaître avec ses propres couleurs, lors d'une manifestation dans laquelle elle est membre d'un groupe, elle ne porte plus ses propres couleurs mais apparaît cette fois sous des couleurs qui exprime ses intentions. On peut donc dire que la personne s'efface au profit du groupe et de ses couleurs. Nous avons donc là pour l'instant trois critères déterminant la parure que sont : la situation, le rang social et l'inclinaison de la personne pour telle ou telle couleur.

Ensuite nous pouvons citer un autre critère qui figure sur les parures ou tout au moins sur les colliers et plus particulièrement les colliers masculins. En effet, ces colliers diffèrent des autres en cela que ce ne sont pas des colliers uniquement fait de franges mais faits d'une cocarde frangée. C'est sur cette cocarde que figure « l'animal » que chaque jeune homme se voit attribuer vers l'âge de la puberté par un chamane. Il y a donc dans le collier de cérémonie une très forte signification symbolique, puisque ces animaux viennent du ciel et renferment toute une symbolique en rapport avec le ciel et la terre, les esprits (défunts) et les vivants. Chaque animal du ciel ayant des caractéristiques propres que le chamane retrouve dans le caractère de l'enfant.

(Photo d'une parure masculine  prise par Léopold Julie, 2012)


Et enfin, la parure de perles fait partie d'un ensemble plus vaste et complexe de parure, qui est une triade: la parure de perles, la parure de plumes et le vêtement traditionnel de coton. En effet, malgré que nous n'ayons pas pu constater cela dans la réalité, nous avons pu voir sur de nombreuses photos que lors de cérémonies ces trois formes ou types de parures sont portées simultanément, il y a donc là encore matière à supposition, puisque l'on retrouve là encore, avec les plumes, l'élément du ciel qui recouvre une grande importance chez les Kali'na. La question serait : est ce que le vêtement de coton ferait lui aussi référence au ciel, ou serait-il plutôt en rapport avec la terre ? Ou aurait-il une signification tout autre ?

Parallèlement à ce côté technique de la parure, nous nous sommes penchés sur la question de la transmission, qui intéresse fortement les ethnologues, puisque ces cultures « traditionnelles » sont aujourd'hui prétendues menacées. Je dis prétendues, car c'est certainement le cas pour beaucoup de
page3image12520
peuples, mais ce n'est pas ce que j'ai pu constater chez les kali'na. Une chose m'a frappé lorsque je suis arrivée chez eux. Je m'attendais à une culture en train de se perdre. Or c'est tout le contraire qu'il m'a semblé voir. Malgré tout le confort « occidental » qu'on peut trouver, comme un matériel technologique dernier cri, on constate que tous les enfants ont appris l'artisanat même s'il ne le pratiquent pas à des fins financières, que lors d'une cérémonie ou manifestation toutes les générations sont présentes. Je pense que les Kali'na sont un exemple, parmi certainement d'autres, d'une culture qui résiste, qui continue d'exister malgré une volonté d'assimilation qui est toujours d'actualité, c'est un peuple qui, je pense, arrive à jongler entre ce que les ethnologues appellent la
« tradition » et la « modernité ». 

Julie Léopold, secrétaire adjointe d'Aruana