lundi 3 décembre 2007

Le soja dévastateur

LE SOJA : dévastateur sur les lieux de production, problématique chez nous.

L’association ARUANA est née pour appuyer la lutte pour leur survie des peuples indigènes qui vivent le long du fleuve Araguaia (centre du Brésil au sud de l’Amazonie).

Le gouvernement de Fernando Enrique Cardoso avait projeté de développer une région de 2 millions de km2 (l’Europe de l’Ouest) appelée le Cerrado (savane arborée) encore en grande partie intacte. Cette région est d’une grande richesse écologique,  particulièrement en espèces de plantes médicinales. Sa biodiversité égale celle de l’Amazonie bien que les données pour ces deux régions ne soient pas encore complètes. La constitution protège l’Amazonie (eh oui !) mais pas le Cerrado qui, outre sa surface disponible, se trouve proche de la capitale Brasilia.

Afin de payer des dettes anciennes et nouvelles, de développer le pays et de céder aux sirènes des milieux économiques, il était prévu de mettre en œuvre un projet appelé « Avance Brésil » comportant le développement d’infrastructures lourdes (voies navigables, barrages, routes) et  de l’agriculture industrielle tournée vers l’exportation.  Ce projet a été concocté dans les milieux décisionnels sans aucune concertation avec la population locale et le gouvernement Lula l’a mis en place.

A partir de l’état du Mato Grosso, 5 voies navigables doivent être construites. L’une d’entre elles, le rio Madeira, existe déjà et comme les autres a pour fonction dominante de transporter le soja, nouvelle culture qui s’étend rapidement et remplace l’élevage et les productions traditionnelles (céréales, tournesol). Le front agricole[1] avance, lui, à toute vitesse en direction de l’Amazonie.

Or, dans cette région vivent encore des peuples indigènes aux effectifs déjà très réduits. Le long du fleuve Araguaia (affluent du Tocantins) vivent plus de 20 peuples mais leur nombre ne dépasse pas 20.000 personnes. Lorsque ce fleuve sera transformé en voie navigable et en une chaîne de barrages, il ne leur restera plus que leurs yeux pur pleurer. Peuples pêcheurs, non chasseurs, non agriculteurs, autochtones des lieux depuis des millénaires (attesté par les recherches archéologiques), ils ne pourront pas survivre sans leur source d’alimentation que constituent les poissons, abondants dans ces eaux très riches.

Ces peuples disparaîtront parce que le Brésil exporte du soja. En même temps ce sont les savanes arborées du Cerrado qui disparaissent et avec elles leur grande richesse  en plantes médicinales dont on n’a pas encore l’inventaire complet. Le climat local se modifie, l’hydrologie de la région également. Or le Cerrado est le château d’eau de la capitale mais aussi du Pantanal, la plus grande zone humide du monde ! Et ses conditions pédologiques qui ne permettent pas un usage intensif des terres, promettent une érosion du sol catastrophique qui a déjà commencé. On estime à 10 kg de sol fertile perdus pour un kg de grains produits. Il y a déjà dix ans, on mesurait 1700 tonnes de sédiments transportés par un seul cours d’eau en direction du Pantanal avec pour conséquence le rehaussement du lit de cette rivière et une inondation permanente des terres (exploitations agricoles) alentours.

60% du soja produit actuellement au Brésil est exporté vers l’Europe, principalement via Rotterdam mais aussi Liverpool et Honfleur.

Dans le Cerrado au moins 1 million de km2 doit être cultivé en soja. Avec l’irrigation et l’utilisation de pesticides à haute dose que cela entraîne. Et la désertification à moyen terme de terres biologiquement et culturellement riches. Peuples indigènes et nature sont sacrifiés. La culture du soja progresse rapidement vers l’Amazonie et on peut s’attendre à une expansion rapide car des accords ont été conclu avec les USA pour transformer le soja en agrocarburant !

A quoi cela sert-il ?

La réponse, vous la connaissez peut-être. Vous avez remarqué qu’on utilise du soja partout à l’heure actuelle (médicaments, cosmétiques, nourriture (voir les plaques de chocolat toutes avec de la lécithine de soja), élevage, etc.). Le soja remplace les plantes qui étaient utilisées traditionnellement en Europe. Non parce qu’il contient de meilleurs éléments nutritifs ou sanitaires. Simplement parce qu’il est moins cher. Pourquoi est-il moins cher ? Parce que le prix de la terre et le coût de la main d’œuvre sont extrêmement intéressants au Brésil ! En plus les voies navigables seront payées par le contribuable. L’opération est une excellente manière de gagner beaucoup d’argent rapidement. Elle est d’une rentabilité haute. Il n’est dès lors pas étonnant de voir quelques noms connus de l’agroalimentaire et de la navigation intéressés par le développement du soja. Et le roi du soja brésilien s’est faire élire gouverneur de l’état du Mato Grosso, l’un des plus grands, celui qui a le plus fort taux de déforestation et celui d’où doivent partir les cinq voies navigables… Il faut savoir que le cours du soja est fixé à la bourse de Chicago. En fonction des intérêts des investisseurs et autres spéculateurs, le taaux de déforestation s’accroît ou ralentit !

Sur les lieux de plantation, cette production en monoculture aura les effets décrits plus haut. Dans les pays de réception, cette importation empêche les exploitants agricoles de fournir les plantes remplissant le même usage et dont l’intérêt nutritionnel est meilleur. Aux deux bouts de cette chaîne, les populations concernées sont perdantes.

Et les consommateurs ?

Ils n’ont guère le choix ! Comment peuvent-ils d’une part connaître l’historique (la traçabilité) du soja contenu dans divers produits ou dans la viande animale et d’autre part les produits agrotoxiques qui l’accompagnent ? Comment peuvent-ils savoir que ce produit vient d’une monoculture gourmande en eau ? Qu’il détruit un énorme potentiel  phytothérapique ? Qu’il est un produit d’investissement financier ? Et qu’il est favorisé par les banques japonaises, les sociétés agroalimentaires (Monsanto, Bunge, Cargill et la française Louis-Dreyfuss) ?

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[1] Expression brésilienne pour indiquer l’avancée de l’agriculture intensive dans les régions encore peu exploitées et notamment en direction de l’Amazonie.

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